Garantie légale de conformité : Vos questions, nos réponses
À partir du 18 mars 2016, la garantie légale de conformité fait l’objet d’une modification favorable aux consommateurs : le délai de présomption, jusqu’ici d’une durée de 6 mois, passe à 24 mois. Concrètement, un consommateur face à un produit défectueux n’aura plus, pendant toute la période des 2 ans de garantie, à prouver que le défaut existait au moment de la vente. C’est au professionnel d’apporter la preuve contraire s’il refuse de réparer le défaut. Explications.
Quel type de produit est couvert par la garantie légale de conformité ?
Cette garantie s’applique :
- aux contrats de vente ;
- aux biens meubles corporels (sont exclus les immeubles et les biens immatériels), déjà montés ou à fabriquer soi-même ;
- neufs ou d’occasion.
À noter que la garantie s’applique aussi à l’emballage du produit, à ses instructions de montage ou d’installation (lorsque le montage et/ou l’installation du produit est à la charge du professionnel ou est réalisé sous sa responsabilité).
Quels sont les critères de cette garantie ?
Dans le cadre de la garantie légale de conformité, pour être conforme au contrat, le bien doit :
- soit être propre à l'usage habituellement attendu d'un bien semblable et :
correspondre à la description donnée par le vendeur et posséder les qualités que celui-ci a présentées à l'acheteur sous forme d'échantillon ou de modèle ;
présenter les qualités qu'un acheteur peut légitimement attendre eu égard aux déclarations publiques faites par le vendeur, par le producteur ou par son représentant, notamment dans la publicité ou l'étiquetage ;
- soit présenter les caractéristiques définies d'un commun accord par les parties ;
- soit être propre à tout usage spécial recherché par l'acheteur, porté à la connaissance du vendeur et que ce dernier a accepté.
Exemples :
Vous commandez une cuisine à un cuisiniste et la teinte des panneaux livrés est différente de la teinte commandée. Il a été jugé que le consommateur pouvait alors agir sur le fondement de la garantie légale de conformité (cour d'appel de Caen, chambre 1, section civile et commerciale, 30 octobre 2008).
Vous commandez un abri de piscine sur mesure. L’abri qui vous est livré présente une erreur de conception qui ne permet pas au roulement de s'effectuer sur une surface plane et horizontale. Il a été jugé dans ce cas que le consommateur pouvait faire jouer la garantie légale de conformité en ce que l’abri livré n'était pas conforme au contrat (cour d'appel d’Aix-en-Provence, 24 mai 2013).
Quel délai pour agir ?
La garantie légale de conformité est valable 2 ans dans toute l'Union européenne.
> À partir du 18 mars 2016
Pour les biens achetés neufs, tout défaut qui apparaîtra dans les 2 ans après l’achat sera considéré comme ayant existé avant la livraison.
Pour les biens achetés d’occasion, la durée reste à 6 mois.
Concrètement, à partir du 18 mars 2016 :
Si le défaut d’un produit acheté neuf apparaît dans les 2 ans après votre achat vous pourrez vous retourner contre le vendeur sans avoir à prouver que le défaut existait au moment de la vente. C’est au vendeur, cette fois, de prouver que le défaut n’existait pas au moment de la délivrance du bien.
Pour un produit acheté d’occasion, le consommateur n’aura pas à prouver que le défaut existait au moment de la vente les 6 premiers mois après achat. Passé ce délai, le consommateur devra apporter cette preuve.
Quand débute la garantie légale de 2 ans ?
La garantie légale débute le jour où vous prenez possession de votre achat.
Si vous entrez dans un magasin et en ressortez avec un achat, la garantie débute à ce moment-là.
Si vous achetez un produit qui vous est livré plus tard, la période de garantie commence le jour de la livraison.
Vous devez donc toujours conserver vos factures et vos bons de livraison.
Contre qui agir ?
Si votre produit présente un défaut de conformité après la livraison, il vous sera possible d’agir contre le vendeur sur le fondement de la garantie légale de conformité à condition que :
- ce défaut existe déjà lors de la délivrance du bien ;
- ou qu’il soit dû à une mauvaise installation du bien si elle a été effectuée par le vendeur ou sous sa responsabilité.
Exemple : pour la vente de lames de parquet défectueuses et mal posées, alors que la pose était effectuée par une entreprise autre que le vendeur mais qui agissait sous son contrôle, le seul interlocuteur du consommateur est le vendeur, qui doit répondre à la fois des défauts de qualité des matériaux et des défauts dans la pose de ceux-ci (cour d’appel de Paris, 19 mai 2011).
Que puis-je obtenir de la part du vendeur ?
Vous pouvez, dans un premier temps, choisir entre la réparation ou le remplacement du produit.
Sachez que si vous optez pour le remplacement du bien que vous avez déjà installé avant l'apparition du défaut, le vendeur est tenu soit de procéder lui-même à l'enlèvement de ce bien du lieu où il a été installé et d'y installer le bien de remplacement, soit de supporter les frais nécessaires à cet enlèvement et à l'installation du bien de remplacement (CJUE, 16 juin 2011, aff. 65/09 et 87/09).
Mais le vendeur peut renverser ce choix si le mode de dédommagement choisi par l'acheteur est impossible (le produit n’est plus fabriqué, le remplacement est donc impossible), ou bien le coût du mode de dédommagement que vous avez choisi est manifestement disproportionné au regard de l'autre modalité, compte tenu de la valeur du bien ou de l'importance du défaut.
Par exemple, vous avez acheté un bien de grande valeur et vous avez opté pour le remplacement de ce bien. Cependant, ce bien est affecté d’un défaut minime, susceptible d'être remis dans un état conforme par une réparation sans inconvénient majeur pour l'acheteur. Dans ce cas le vendeur peut vous refuser le remplacement du bien et opter pour sa réparation, car le coût de son remplacement est disproportionné par rapport au coût de réparation.
Inversement, si la réparation est impossible, le remplacement du produit sera donc l’option qui s’imposera à vous.
Exemple : pour le remplacement, bien que d'un coût élevé, d'un abri de piscine, mais dont la réparation est impossible (CA Aix-en-Provence, 24 mai 2013).
Dans un second temps, et uniquement dans l’hypothèse où la réparation ou le remplacement du produit sont impossibles ou ne sont pas réalisés dans le délai d’un mois suivant votre réclamation, vous pouvez alors demander au vendeur soit une réduction du prix du produit, soit la résolution de la vente.
Par exemple, un consommateur qui achète un appareil photo qui ne fonctionne pas et que la réparation ou le remplacement du boîtier défectueux n'est pas possible puisqu'il est affecté d'un défaut inhérent à la conception même de l'appareil, le consommateur est en droit d'obtenir la résolution de la vente (CA Paris, 27 nov. 2014, Berthold K. c/ Pierre-Yves L.).
Si vous optez pour une réduction du prix, vous pouvez garder le produit défectueux, si vous optez pour la résolution, vous serez remboursé de l’intégralité du produit mais devrez restituer le produit au vendeur. Sachez que vous ne pourrez pas obtenir la résolution du contrat de vente si le défaut du produit est mineur.
Par exemple et concernant des commandes de cuisines équipées il a été jugé que :
ne pouvait obtenir la résolution du contrat l’acheteur d’une cuisine équipée qui reproche au vendeur de ne pas l'avoir averti de la différence de teinte des portes de placards et des côtés du mobilier, au motif que ce défaut est considéré par les juges comme un défaut mineur (cour d'appel Paris Pôle 5, chambre 11, 13 avril 2012).
pouvait obtenir la résolution du contrat l’acheteur d’une cuisine équipée qui recevait la cuisine avec un élément d'angle de 100 centimètres au lieu de 123 comme prévu sur le bon de commande, différence de dimension qui empêchait l'installation des éléments de cuisine en raison de l'écart existant entre la partie droite de ce meuble et la cloison. De plus, les teintes et veinés des éléments livrés comportaient des différences importantes, alors qu'ils étaient destinés à être installés dans la même cuisine. L’acheteur a pu dans ce cas obtenir la résolution de la vente, le vendeur étant contraint de venir récupérer et désinstaller à ses frais les éléments de cuisine défectueux (cour d'appel de Toulouse, 3e chambre, 1re section, 3 juin 2014).
Combien cela va-t-il me coûter ?
Dans tous les cas, les produits défectueux doivent être réparés ou remplacés sans aucuns frais pour le consommateur et cette règle vaut aussi pour les frais d'envoi.
Je me fais livrer un produit, mais le livreur refuse que je contrôle le colis/le colis nécessite une installation pour contrôler sa conformité, que puis-je faire ?
Le livreur a l’obligation d’autoriser le contrôle du colis par l’acheteur lors de la livraison (Cour de cassation 22/11/1933). Face à un livreur trop pressé, vous devez impérativement indiquer sur le bon de livraison que l'on vous a refusé la possibilité de vérifier le contenu du colis. Si après avoir déballé le colis vous remarquez un défaut, écrivez rapidement au vendeur par lettre recommandée avec avis de réception (LRAR).
Si le produit nécessite une installation pour vérifier sa conformité, vous pouvez accepter le colis sans émettre de réserves, mais si après installation un défaut se manifeste, écrivez rapidement au vendeur par LRAR sur le fondement de la garantie légale de conformité. Ne tardez pas à écrire au professionnel, le défaut est censé exister au moment de la vente, plus vous tardez et plus le professionnel pourra vous dire que le défaut est apparu après la vente.
Le vendeur ne peut insérer dans ses conditions générales de vente une clause qui précise que le fait pour l’acheteur de ne pas formuler de réserves sur le bon de livraison est assimilé à un refus de contester la conformité de la commande (affaire "Père Noel", tribunal de grande instance de Paris, jugement du 4 février 2003). Peu importe l’absence de réserves, le professionnel est responsable de toute dégradation constatée après la livraison, sauf à démontrer que le défaut est apparu après la livraison. : concernant un four à micro-ondes livré cassé, la cliente n’avait pas émis de réserves lors de la livraison mais a informé le vendeur de ces défauts dès le jour de la livraison. Les juges ont donc considéré que les défauts étaient présumés avoir existé au moment de la livraison. L’absence de réserves circonstanciées sur le bon de livraison ne lui fait pas perdre le bénéfice de la présomption d'existence des défauts de conformité invoqués (30 juillet 2010, juridiction de proximité de Montmorency).
J’ai acheté un bien défectueux, ai-je droit à des dommages et intérêts en plus des garanties légales ?
Bien souvent lorsque le défaut du produit vous a causé un préjudice matériel ou moral, vous pouvez toucher une somme supplémentaire correspondant à des dommages et intérêts.
Exemple : un consommateur ayant acheté un ordinateur atteint d’un défaut de conformité s’est vu attribuer par le tribunal, en plus de la résolution de la vente, des dommages et intérêts pour le préjudice de jouissance temporaire subi, ainsi que le temps perdu au vu des nombreux échanges de courriers avec la société (Cour de cassation, 1re chambre civile, 14 octobre 2015, no de pourvoi : 13-11.840).
Le professionnel m’oppose une expertise de son service interne. Est-ce que cela suffit pour me refuser l’application de la garantie de conformité ?
À partir du 18 mars 2016, le défaut sera présumé antérieur à la vente pendant toute la période de la garantie de 2 ans.
Mais le professionnel pourra toujours apporter la preuve que le défaut est apparu après la vente. La plupart du temps, afin d’apporter cette preuve, il fera appel à un expert pour examiner le produit.
Cet expert peut être une personne interne à l’entreprise qui vous a vendu le produit, ou encore une personne désignée par cette entreprise, sans que l’entreprise ne vous en ai tenu informé(e) avant.
Une expertise établie dans ces conditions ne vous est, en principe, pas opposable, car pour être recevable à titre de preuve devant le juge, une expertise doit avoir été faite contradictoirement, c’est-à-dire en la présence des deux parties (Cour de cassation, chambre civile 1, 8 décembre 2009, no 09-11.919).
Vous pourrez donc contester la recevabilité de cette expertise devant le juge lors du procès.
Au-delà des 2 ans, puis-je encore agir si mon produit est défectueux ?
Si vous avez laissé passer le délai de 2 ans de la garantie de conformité, vous pourrez agir en garantie des vices cachés lorsque le produit acheté présente un dysfonctionnement qui le rend impropre à l’usage auquel il est destiné. Vous avez alors 2 ans à compter de la découverte du vice pour agir, au choix, contre le vendeur, le fabricant ou les vendeurs successifs du bien, ce qui vous laisse un large choix d’interlocuteurs. Cependant, pour faire jouer cette garantie, sachez qu’il vous appartiendra de prouver l’existence de ce vice au moment de l’achat.
Le recours à un expert est dans ce cas nécessaire. Les greffes des tribunaux peuvent vous communiquer une liste d'experts.
Si vous êtes amené(e) à aller devant les tribunaux, sachez qu'une expertise établie de façon contradictoire, en présence de la partie adverse, aura plus de force. Seule une expertise contradictoire ne peut valoir à titre de preuve (Cour de cassation, chambre civile 1, 8 décembre 2009, no 09-11.919).
Mais lorsque l’expertise est impossible ou bien lorsqu’un faisceau d’indices suffit à prouver l’existence du vice au moment de la vente, le juge peut juger sans qu’une expertise ne soit réalisée.
Exemple : les juges ont accepté que l’acheteur de deux iMac n’ait pas recours à un expert pour prouver l’antériorité du vice. Les juges ont considéré les témoignages faits sur les forums de discussions comme preuves suffisantes de l'étendue du problème. Le juge a qualifié ce problème vice intrinsèque à la fabrication des machines, en résumé, un vice caché ouvrant droit à remboursement par la société Apple des deux ordinateurs (juridiction de proximité de Palaiseau, 3 juin 2008).
Aussi, il a été jugé qu’un rapport d'expertise, demandé par l'assureur de l'acheteur, a certes été établi non contradictoirement, mais le vendeur a été convoqué aux opérations d'expertise. Le rapport est dans ce cas recevable au tribunal.
Mais alors, à quoi sert la garantie commerciale ?
La garantie commerciale est une garantie contractuelle, mise en place par le vendeur ou le fabricant qui vise la plupart du temps à réparer le bien, contrairement à la garantie légale de conformité où un choix est offert au consommateur. Elle n’est pas obligatoire et surtout elle ne peut venir écourter ou réduire le champ d’application de la garantie légale de conformité.
Jusqu’au 18 mars 2016, elle avait un intérêt important pour une majorité de produits dès lors que la présomption sur l’origine des défauts ne durait que 6 mois. Elle peut encore avoir un intérêt aujourd’hui si elle va au-delà des 2 ans légaux.
Mais attention, le consommateur devra bien souvent assumer certains frais comme les frais de retour, voire, dans les cas extrêmes, la main-d’œuvre.
La garantie commerciale peut aussi connaître des limites géographiques alors que la garantie légale s’applique même si le défaut apparaît dans un pays hors de l’Union européenne.
Exemple : la panne d’une voiture d’occasion achetée en France et qui se manifeste au Maroc. La garantie conventionnelle limitait le champ d’application aux dommages survenus en France. Les juges ont donc appliqué la garantie légale de conformité puisque le bien avait été acheté en France (cour d'appel, Montpellier, 1re chambre, section B, 8 octobre 2014, no 13/01138).
Ainsi, les deux premières années suivant l’achat ou la livraison, réclamez l’application de la garantie légale de conformité.
Mon produit ne fonctionne pas. Qui dois-je contacter, le commerçant ou le fabricant ?
Dans les 2 ans suivant un achat effectué après le 18 mars 2016, il faut sans hésiter vous tourner vers le vendeur pour demander l’application de la garantie légale de conformité.
Au-delà, si vous disposez d’une garantie commerciale, il sera plus simple de la faire jouer que de devoir vous lancer dans une expertise pour faire jouer la garantie des vices cachés.
Les extensions de garanties valent-elles le coup ?
Les extensions de garanties doivent vous permettre de couvrir votre produit au-delà des conditions de la garantie légale (notamment quant à sa durée, au-delà de 2 ans). Elles sont payantes et proposées par le vendeur lors de la vente d’équipements un peu onéreux (mobilier, matériel high-tech, produits électroménagers).
C’est un marché juteux pour les vendeurs dont les marges peuvent dépasser les 50 % mais qui se révèlent bien moins intéressant pour les consommateurs.
En effet, dans de nombreux cas, les pièces d’usure ou les accessoires ne sont pas pris en charge même s’ils coûtent cher (la batterie d’un téléphone portable, l’ampoule d’un rétroprojecteur, la télécommande d'un téléviseur, par exemple).
Par ailleurs, la mise en œuvre de cette garantie peut se révéler très coûteuse pour le consommateur. À titre d’exemple, de nombreuses extensions de garanties prévoient, pour un appareil qui est installé à plus de 30 km du magasin ou qui ne pèse pas moins de 35 kg, que le consommateur devra lui-même l’amener au magasin pour le faire réparer, le dépanneur ne se déplacera pas. Quant au prêt d’un autre appareil le temps de l’intervention du service technique, il se fait dans la limite des stocks disponibles et uniquement si la réparation dure au-delà d’un certain nombre de jours (14 jours, en général).
Enfin, l’indemnité de remplacement promise se calcule en tenant compte de l’âge de l’appareil. En général, le commerçant pratique un abattement de 1 % par mois à compter de la date d’achat de l’appareil. En clair, au bout de 5 ans, l’indemnité risque de fondre de 60 % (60 mois x 1 %). Pour les produits dont le prix chute rapidement après achat, ces extensions sont donc sans intérêt car elles coûtent cher au consommateur (généralement entre 10 et 20 % du prix initial de l’appareil) pour couvrir un produit dont le prix a déjà fortement chuté dans les deux années après achat.
Et puis les pannes sont-elles vraiment aussi fréquentes ? Bien des vendeurs mettront en avant l’obsolescence programmée pour essayer de vous faire peur et de vous vendre une extension de garantie sur le discours « les fabricants font exprès de programmer leurs produits pour qu’ils ne durent que deux ans ». À titre d’exemple cocasse, c’est ce qu’avait argué un vendeur d’une enseigne connue à un de nos collaborateurs s’agissant d’une console de jeu vendue à perte par son fabricant… Plus sérieusement, selon Serge Fisnot, le fondateur de la Société française de garantie (SFG), créée en 1992, la majorité des pannes se produisent soit pendant les deux premières années de vie du produit, soit au-delà de 5 ans.